L’article 174 de la loi sur le contrat d’assurance, prévoit que :
« Lorsque les héritiers légaux sont désignés comme bénéficiaires sans indication de leurs noms, les prestations d’assurance sont dues, jusqu’à preuve du contraire ou sauf clause contraire, à la succession du preneur d’assurance ».
Cette disposition visait à trancher la controverse née en doctrine et en jurisprudence quant aux bénéficiaires d’une assurance vie lorsque le contrat prévoit que le bénéfice de l’assurance reviendrait « aux héritiers légaux ».
Par l’insertion de ce nouvel article dans la L.C.A.T., le législateur avait entendu attribuer à la succession du preneur le bénéfice d’une telle assurance, de sorte que tout héritier ou légataire universel, voire à titre universel, puisse dorénavant percevoir le capital assuré puisque celui-ci revient alors dans le patrimoine successoral du défunt afin d’être partagé entre les héritiers légaux ou les légataires.
Cette disposition, insérée par la loi du 13 janvier 2012 [19], était applicable immédiatement aux contrats souscrits après son entrée en vigueur [20].
Pour les contrats d’assurance vie en cours, l’article 3 de la loi précité avait prévu un délai transitoire de 2 ans durant lequel le preneur d’assurance pouvait signer un avenant pour déclarer qu’il renonçait à l’application du nouvel article 110/1.
Au terme de cette période transitoire, à défaut d’avoir signé le moindre avenant, l’article 110/1 L.C.A.T. devait s’appliquer au contrat.
Malheureusement, pour certains légataires, la période transitoire n’a pas été sans difficulté.
Ainsi, dans l’espèce soumise à la Cour constitutionnelle et ayant donné lieu à l’arrêt du 3 mars 2016 [21], un homme avait souscrit une police d’assurance et avait désigné, comme bénéficiaire, « ses héritiers légaux ».
Or, il n’avait aucuns héritiers légaux. Il avait, toutefois, rédigé un testament où il instituait un tiers comme légataire universel de sa succession.
Cet homme étant décédé durant la période transitoire, donc avant l’expiration du délai de deux ans pendant lequel il aurait pu renoncer à l’application de la loi nouvelle, la compagnie d’assurances arguait que la disposition nouvelle ne pouvait trouver à s’appliquer et qu’à défaut d’héritiers légaux, il n’existait pas de bénéficiaire au contrat d’assurance.
La Cour constitutionnelle considère que « La disposition en cause a pour effet que lorsque le preneur d’assurance d’un contrat d’assurance vie conclu avant le 5 mars 2012 décède au cours du délai précité de deux ans, la disposition contenue dans l’article 110/1 de la loi du 25 juin 1992 ne peut s’appliquer » [22]. Après une longue analyse des travaux préparatoires de la loi, elle décide qu’en principe, les dispositions transitoires querellées ne créaient pas, en soi de discrimination.
Cependant, la Cour nuance son propos en soulignant qu’il pouvait exister une atteinte au droit au respect des biens garanti par l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’Homme lorsque, comme en l’espèce, le légataire se trouvait privé du bénéfice de l’assurance vie et qu’il n’existait pas d’autre bénéficiaire possible.
Pour la Cour, l’article 110/1 est donc immédiatement applicable au contrat d’assurance dont le preneur ne laisse aucuns héritiers légaux, sauf à établir, ce que le juge a quo doit examiner, que le preneur a entendu volontairement exclure le nouvel article 110/1 durant la période transitoire et dénier au légataire le droit de percevoir le capital assuré.
8. Régime matrimonial – Code Napoléon – Séparation de biens avec société d’acquêts – Disposition transitoire. – La Cour constitutionnelle était saisie de la compatibilité de l’article 1471 ancien du Code civil avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que cette disposition, applicable pour les époux marié avant l’entrée en vigueur de la loi du 14 juillet 1976, autorisait la femme à prélever, avant son époux, les biens qu’elle désire dans la communauté [23].
Pour la Cour, il ne pourrait y avoir de discrimination dès lors que l’article 1471 ancien du Code civil constituait un droit de priorité pour l’épouse.
Cette disposition n’avait donc pas pour conséquence d’avantager économiquement un époux sur l’autre.
De plus, il était loisible aux époux, depuis la réforme de 1976, de modifier leur régime matrimonial afin d’y inclure les dispositions transitoires que le législateur ne leur aurait pas appliquées.
À défaut d’avoir d’initiative modifié leur régime matrimonial, les époux mariés sous un régime matrimonial conventionnel antérieur à la loi du 14 juillet 1976 doivent se voir appliquer toutes les dispositions de leur régime, en ce compris les règles de la liquidation auxquelles il n’aurait pas été dérogé par la loi « nouvelle ».